Le film de Lucas Belvaux sur le Front National qui sort le 22 fĂ©vrier aurait Ă©tĂ© dĂ©programmĂ© Ă Saint-Cloud sur injonction du maire. EnquĂȘte sur les dessous dâune affaire confuse. Mardi 14 fĂ©vrier 2017, 17h00. Les rĂ©dactions reçoivent par mail un communiquĂ© cinglant du Pacte, le distributeur de Chez nous. Il y est notifiĂ© en substance "quâĂ la demande de la mairie de Saint-Cloud administrĂ©e par un Ă©lu LR, le cinĂ©ma municipal Les 3 Pierrots a dĂ©cidĂ© de dĂ©programmer le film Chez Nous de la ville. ⊠Le Pacte, qui a pour habitude de programmer des Ćuvres cinĂ©matographiques dans cette mĂȘme salle, a offert la possibilitĂ© au Maire Eric Berdoati de voir le film. Ce dernier a refusĂ© et maintient la dĂ©programmation." Quatre heures plus tard, le maire en question se fend Ă son tour dâun communiquĂ© tout aussi tranchant, qualifiant les propos du Pacte de "tendancieux et erronĂ©s". Il ajoute que le film, envisagĂ© un temps par le GPCI une structure intermĂ©diaire qui, pour simplifier, fait des propositions de programmation Ă une centaine de salles en France, nâa pas Ă©tĂ© retenu par Les 3 Pierrots pour des raisons Ă©ditoriales. "La programmation art et essai du cinĂ©ma Les 3 Pierrots de Saint-Cloud ne relĂšve pas du maire mais de professionnels qui, comme pour nâimporte quelle petite salle, opĂšrent des choix, prĂ©cise Eric Berdoati. Il est Ă noter quâune critique nĂ©gative du film dans Les Cahiers du CinĂ©ma avait influencĂ© le programmateur dans sa sĂ©lection." VoilĂ pour les faits. Chez Nous nâest pas le brĂ»lot anti FN annoncĂ© Saint-Cloud rĂ©siste 24 heures plus tard, les esprits sont toujours Ă©chauffĂ©s. Pierre Jacquemont, directeur des 3 Pierrots, le cinĂ©ma-théùtre de Saint-Cloud, Ă©voque Ă PremiĂšre un "buzz totalement artificiel autour dâun long mĂ©trage moyen, qui tient plus du tĂ©lĂ©film que du film dâauteur" -ce qui semblerait accrĂ©diter la thĂšse de la dĂ©cision purement Ă©ditoriale. Mais ce qui irrite au plus haut point Pierre Jacquemond concerne la terminologie employĂ©e par Le Pacte. "Parler de 'dĂ©programmation' sous-entendrait que le film a Ă©tĂ© programmĂ©, annoncĂ© et retirĂ©. Câest un mensonge Ă©hontĂ© puisquâil nâa jamais Ă©tĂ© retenu !", sâĂ©nerve le directeur du cinĂ©ma, qui compte deux salles et doit faire face Ă une avalanche de sorties. "Pour la semaine du 22 fĂ©vrier, la programmation sâest portĂ©e sur Split, Ă destination dâun large public", affirme le GPCI dans un communiquĂ©. "Lion, pourtant plusieurs fois nommĂ© aux Oscars, nâest programmĂ© que la semaine suivante." Et Pierre Jacquemond de se faire lâavocat de son cinĂ©ma-théùtre âet de la ville "En douze ans, aucun film ou spectacle nâa Ă©tĂ© interdit ni retirĂ©. Nous avons programmĂ© Merci patron ! et Moi, Daniel Blake distribuĂ© par⊠Le Pacte, ndlr, des films trĂšs engagĂ©s. Des artistes tels que StĂ©phane Guillon et Guy Bedos, pas franchement Ă droite, se sont produits ici sans problĂšme. Le Pacte veut se faire un coup de pub sur notre dos, câest pitoyable." Le Pacte contre-attaque Instigateur de la polĂ©mique, Jean Labadie, patron du Pacte, reste campĂ© sur ses positions malgrĂ© les dĂ©nĂ©gations du GPCI, de la Mairie et des 3 Pierrots. "Chez nous, jâinsiste, a Ă©tĂ© tout Ă fait programmĂ© en amont par Les 3 Pierrots, ce qui est bien naturel puisque Le Pacte doit ĂȘtre le deuxiĂšme ou le troisiĂšme fournisseur de la salle qui passe environ 90% de nos films sur lâannĂ©e. Quand nous avons appris sa dĂ©programmation, on a fait notre boulot et on appelĂ© le GPCI pour avoir une explication. La personne quâon a eu au bout du fil nous a formellement dit que la Mairie ne voulait pas du film. On nâinvente pas un truc pareil. On a mĂȘme Ă©tĂ© jusquâĂ demander au GPCI de faire passer au maire LR un extrait dâun discours de Xavier Bertrand incitant Ă diffuser Chez Nous le plus possible". Le nĆud du problĂšme est bien lĂ , dans cette assertion invĂ©rifiable, sinon auprĂšs du GPCI qui, par lâintermĂ©diaire de Charles Vintrou, son gĂ©rant, sâinscrit totalement en faux. "Je ne comprends pas que Jean Labadie sâabaisse Ă ce genre de manĆuvre", regrette-t-il. "Les choix de programmation du GPCI nâont quâune ambition artistique, pas politique". "La salle et le GPCI sont coincĂ©s", continue Jean Labadie. "Je suis ennuyĂ© pour eux car ce sont des gens sympas avec lesquels on travaille bien. On a les mĂȘmes problĂšmes avec certaines salles dans le sud-est. Pour lâinstant, le film nâest pas programmĂ© Ă Orange. On saura pour Nice en fin de semaine. Le cas Ă©chĂ©ant, personne ne nous dira, comme Ă Saint-Cloud, si les mairies pĂšsent sur les dĂ©cisions prises. AprĂšs, en cas de bon dĂ©marrage, la logique commerciale prĂ©vaudra peut-ĂȘtre en deuxiĂšme, troisiĂšme semaine." Au-delĂ de la polĂ©mique disons plutĂŽt, querelle, cette situation illustre la complexitĂ© du rapport de force historique entre distribution et exploitation dont les objectifs diffĂšrent Ă lâune, la visibilitĂ© maximale de ses films, Ă lâautre, la prioritĂ© aux oeuvres susceptibles dâattirer une clientĂšle identifiĂ©e. Saint-Cloud est-elle tout simplement le cĆur de cible de Chez nous ?
Leréalisateur belge Lucas Belvaux a dénoncé mercredi un acte "politique" aprÚs la "déprogrammation" de "Chez nous", son film inspiré du Front national, d'un cinéma de Saint-Cloud, une